Le sarcophage carolingien de Lommerange
Article du Journal de l’Agglo Hiver 2021/2022
En 2013, un objet particulièrement intéressant et rare est venu compléter les collections du Musée de la Tour aux Puces de Thionville : un sarcophage monoxyle datant de la période carolingienne.
Une bille de bois, relativement fruste et engoncée dans une gangue de terre humide, est découverte fortuitement en octobre 2008 lors de travaux mandatés par la Communauté d’Agglomération Portes de France-Thionville à l’occasion du remplacement de la citerne de fuel de l’église de Lommerange. Prévenus, les services régionaux de l’Archéologie rapatrient l’objet à leur centre d’étude et de conservation, à l’époque installé à Scy-Chazelles.
La visualisation d’une loge céphalique (indiquant le placement de la tête du défunt dans un cercueil), creusée dans la masse monoxyle, c’est-à-dire
constituée d’une seule pièce de bois, donne avec certitude la destination de l’objet, à savoir un sarcophage datant vraisemblablement du Moyen Âge.
Long de plus de deux mètres, taillé à l’aide d’outils dans un fut de chêne, le sarcophage est façonné dans la masse. L’estimation chronologique est confirmée assez rapidement par des analyses au C14, un isotope radioactif du carbone permettant la datation d’éléments organiques : il remonterait à une période comprise entre 885 et 980, soit la fin de la période carolingienne.
Mais ce sarcophage médiéval est en danger. Découvert dans un milieu humide ayant permis sa conservation jusqu’à nos jours, l’objet sorti de son milieu ambiant risque de disparaître à tout jamais. Une lourde restauration est nécessaire, confiée au laboratoire Arc- Nucleart à Grenoble, spécialiste des bois gorgés d’eau. Dix-mois seront nécessaires afin de stabiliser l’objet et permettre sa présentation au musée de la Tour aux Puces de Thionville, dans le cadre d’une convention de dépôt contractée entre les communes de Thionville et de Lommerange.
Le sarcophage de Lommerange est un témoin exceptionnel de ce mode d’inhumation. Il n’existerait en France que trois sarcophages dans cet état de
conservation. Cette rareté de cercueils monoxyles en état ne signifie pas pour autant un mode d’inhumation disparate ou destiné à des élites, mais la matière même du cercueil, le bois, interdit toute statistique sur la proportion de ces modes d’inhumation dans les nécropoles du Haut Moyen Âge.
Texte : Bruno TOUVERON